En lisant l'analyse d'Isaiah Berlin de la relation entre le romantisme et Kant (il y en a une), je pense à la nature et au libre arbitre. La tendance, du moins aux Etats-Unis, est d’attribuer de plus en plus de comportements à une cause génétique. L'agressivité serait sur le gène 12, la solidarité sur le chromosome 6, le mysticisme sur le 18. Nous serions des automates dont le comportement programmé se transmettrait de génération en génération. Lors du séquençage du génome humain, les généticiens se sont montrés surpris du nombre de gènes détectés. 25'000 au plus. Bien inferieur aux 100000 prédits.
Je jubile. Les humains ont seulement deux fois plus de gènes qu'un animal primitif comme le nématode. Où sont-ils, tous ces gènes du comportement? Attribuer le comportement aux gènes dispense l'être humain de prendre ses décisions librement, mais surtout permet de dispenser la société de sa responsabilité. Si les jeunes noirs ne finissent par leurs études et remplissent les prisons, si les pères ne remplissent pas leurs obligations, si les jeunes filles deviennent mères trop tôt, c'est génétique. Solution: médications? Manipulations génétiques? Sélection au stade embryonnaire? Aldous Huxley?
Dans le monde de la recherche, il y a une tendance non scientifique à disculper la société, et il y a une tendance non scientifique chez moi à croire de toute ma foi que l'être humain peut prendre des décisions responsables dans la mesure où la société lui offre un environnement adéquat. Que tous les plus beaux rêves de l'humanité de justice, d'égalité, de solidarité ne vont pas passer à la poubelle au nom de la science.
Contribué par - - Arabella Hutter