Curiosity is not going to kill this cat/La curiosité n'a jamais été un vilain défaut.
Saturday, December 12, 2009
Où donc a passé Jon Elster?
J'ai essayé de trouver une photo plus flatteuse de Jon Elster. Même si je plaisante sur son style, je respecte son travail.
Vous aurez remarqué que je n'ai pas parlé d'Elster depuis un moment. Au dos de son livre, citation d'un plaisantin qui prétend que Elster écrit "avec verve". Vous me devez de la reconnaissance pour m'atteler à ses textes moroses, à votre service. Une espèce de Reader's Digest, au fond. (Ça existe encore, Reader's Digest? Je les adorais quand j'étais adolescente) Monsieur Jon Elster ne favorise pas la glamour, il préfère la litote, et des listes, des listes et des listes. Bon, j'ai un petit penchant pour les listes moi aussi, mais je ne les fais pas lire aux autres. Listes du genre: (1) colère envers les gens qui nous ont fait du mal (2) colère envers les gens qui nous ont aidés (3) délectation de l'envie des autres (4) etc. Parce qu'il ne croit pas en une sociologie systèmatique qui aurait des règles et des prédictions précises. Une théorie intéressante, mais rejoint-elle vraiment Glissant? Il dit qu'il est comme un dentiste, avec une boîte à outils. Etant donnée une certaine situation, un certain nombre de sujets vont réagir par x et un autre nombre de sujets par y. Qu'il n'est pas possible de prédire ces nombres pour x et pour y. Et 5 pages plus loin, de ces pages écrites dans son style parsimonieux, il se met à aligner toutes sortes de remarques qui se réfèrent à la liste. On (je) doit constamment passer du passage présent à cette liste à 5 pages de distance, un pensum, pour ne pas avoir mémorisé les (17) articles dans la liste. J'ai pris un congé-plaisir en passant par les mémoires de Twyla Tharpe, divertissant! Elle se fait Baryshnikov! Et pour me laisser glisser dans Glissant. Quant à ce dernier, à suivre.
Le seul intérêt que l’on peut trouver à lire la prose d’Elster serait pour se renseigner sur l’état d’impensé. Votre billet en témoigne d’une façon très succincte mais convaincante. Cet « état d’impensé » exprime une détresse lexicale et syntaxique rare. Manifestement il s’agit d’une démonstration voulue. L’auteur nous indique que dans ce dépouillement il y a à reconnaître toute une Scholastique de la théorie. Mais il s’agit d’un schème mimétique. Elster espère Wittgenstein, le 1er , mais il reste au niveau scolaire celui de l’Homo-académicus. Elster est un homo-academicus. Il n’y a qu’à lire son dernier livre comme objet d’abord. Car la forme donne tout le sens de la « thèse » défendue. Il n’y en a sérieusement aucune autre viable. Malgré la proclamation tapageuse de son titre, sous-titre et avertissement de l’auteur qui s’agit d’une trilogie. C’est comme l’opération du Saint Esprit la thèse académique se scande trois fois…
ReplyDeleteJ'adore votre commentaire, très imagé, bourré de verve, lui! Je ne suis pas sociologue, ce qui fait que je ne me sens pas les outils pour vraiment critiquer avec validité les écrits de Jon Elster. Je trouve les sujets qu'il aborde passionnants: le rapport entre la raison et les sentiments, le rôle du désinterressement dans nos comportements. Mais effectivement, je n'ai pas tiré beaucoup de son livre, à part une stimulation à la réflexion.
ReplyDeletePs- Je publierai la semaine prochaine un texte d'Edouard Glissant. Vous ne pourrez pas lui reprocher d'être "impensé", lui!
ReplyDeleteGlissant, avec lui la pensée caraïbe, permet de se défaire du prisme philosophie et de la raison comme pensée. Il ne reste qu'une idéologie. Elster est encore, à mon sens, dans le ratio que génére le signe et le sens en équivalence. Même en négatif, le signe, sucite la production d'un sens. On peut compréhendre cela plus vivement encore avec sa dernière lubie. Je veux parler de sa compréhension de l'irrationnalité comme envers de la rationalité. C'est dire le niveau scolaire de la théorie. J. Elster semble découvrir en fin de carrière que la rationalité n'est pas partout égale. Alors quoi, eh ben??! c'est surement du contraire à quoi on affaire. Bête comme chou. Comme il ne peut pas comprendre son sujet, par défaut, il est dans la reproduction du sens, il en reste aux mêmes références que plus personne n'ira vérifié. Elster me fait pensé au groupe Nine Inch Nails, c'est un bruististe. Il produit un mur de références pour masquer l'absence de théorie clair.
ReplyDeleteQui admirez-vous comme penseurs? Je serais curieuse de le découvrir...
ReplyDeleteJe découvre votre blog. Il est vraiment bien. Les prochains jours j’aurai plus de temps pour lire vos billets. Je viens de lire l’entretien que vous a accordé Animesh Rai. D’autre part, votre blog bilingue va me permettre d’améliorer mon anglais. Pour ce qui est de votre question. Disons que je n’ai pas de panthéon particulier, pas de musée intérieur. Peut être une interrogation permanente : qu’elle présence au monde incarné à soi-même et aux autres ? être pour soi à la façon des philosophes du retrait et du renoncement? Dans ce cas ce serait probablement Montaigne. Cependant dans l’actualité qui est la notre, particulièrement en France, aujourd’hui, c’est une tentation qui, je crois nous est interdite. Alors dans ce cas, finalement, le seul penseur vraiment conséquent actuellement c’est Michel Foucault.
ReplyDeleteOui, votre interrogation personnelle me semble essentielle, certainement une avec laquelle je me débats.
ReplyDeleteBon, je vais me remetter à Michel Foucault. Quand je l'ai lu, ses idées ne me paraissaient pas si révolutionnaires, mais j'ai l'impression qu'elles avaient déjà intégrées dans mon environnement culturel. Comme si quelqu'un lisait Darwin sans savoir qu'il est du XIXe dirait qu'il ne nous apprend rien de nouveau!